Documentaire franco-algéro-helvético-qatari de Lina Soualem (2020), avec Aïcha Soualem, Mabrouk Soualem, Zinedine Soualem, Lina Soualem… 1h12. Sortie le 13 octobre 2021.
Lina Soualem et Mabrouk Soualem
Quand ses grands-parents paternels Aïcha et Mabrouk annoncent leur décision surprenante de se séparer après plus de soixante ans de mariage, Lina Soualem décide de reconstituer leur trajectoire de vie, de leur Algérie natale au cœur de l’Auvergne. Elle accomplit ainsi un devoir de mémoire salvateur qui passe aussi par le témoignage de son père, le comédien Zinedine Soualem, devenu l’un des interprètes de prédilection de Cédric Klapisch. En choisissant cet angle mémoriel intime, la réalisatrice (dont la mère n’est autre que l’actrice Hiam Abbass) élargit évidemment son propos à une communauté rarement questionnée sur les raisons et les circonstances de son immigration qui a même parfois fait table rase de ses racines et laissé ses descendants orphelins de leur mémoire familiale. Ce documentaire trouve en cela des échos dans un autre film récent, de fiction celui-là : ADN de Maïwenn qui s’interrogeait également sur les notions d’identité et de racines.
Aïcha Soualem
Leur Algérie réussit la prouesse de partir d’une problématique familiale pour dresser le portrait impressionniste d’une communauté toute entière. Précisons ici que c’est à la faveur d’un voyage universitaire que la réalisatrice, alors étudiante en histoire, à découvert l’Algérie de ses ancêtres. À l’arrivée, son film apporte une pierre à l’édifice de l’immigration et mieux vaut tard que jamais. Leur Algérie fait partie de ces documentaires qui intègrent leur processus de création. Lina Soualem privilégie naturellement sa grand-mère volubile. Jusqu’au moment où elle réalise que l’histoire qu’elle veut raconter est celle d’un couple et qu’il faut que son grand-père sorte de ce mutisme qu’elle met sur le compte de la pudeur. Alors elle l’emmène dans des lieux et lui montre des photos qui réactivent sa mémoire en libérant sa parole. De la confrontation de ces deux points de vue émerge un itinéraire de vie commun d’où se dégage une émotion indicible qui se traduit par une véritable quête identitaire de la part de la réalisatrice. Un pèlerinage aussi nécessaire que pénétrant.
Jean-Philippe Guerand
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