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“Le traducteur” de Rana Kazkaz et Anas Khalaf




The Translator Film syrio-franco-helvético-belgo-quatari de Rana Kazkaz et Anas Khalaf (2020), avec Ziad Bakri, Yumna Marwan, David Field, Sawsan Arsheed, Miranda Tapsell, Fares Helou, Reem Ali, Rami Farah… 1h45. Sortie le 13 octobre 2021.



Yumna Marwan et Ziad Bakri



Engagé comme interprète par l’équipe olympique syrienne aux Jeux de Sydney 2000, Sami a commis un lapsus qui l’a contraint à l’exil. Alors, quand onze ans plus tard la révolution gronde dans son pays et que son frère est arrêté, il entreprend de partir à sa rescousse. Élevés entre la France et les États-Unis, le couple de réalisateurs syriens formé par Rana Kazkaz et Anas Khalaf a voulu contribuer avec ce film à une cause dont il est resté davantage témoin qu’acteur, avant d’émigrer pour l’Australie, mais pas en même temps. Le traducteur adopte la facture d’un genre codifié, le thriller, pour se livrer à une réflexion subtile sur les principales composantes de l’identité nationale. En abordant ce sujet une décennie après les faits, les cinéastes expriment les espoirs qui motivaient alors la population syrienne. C’est parce que la situation était alors porteuse d’espoir que le film se situe dans cette perspective, la suite appartenant à une phase nettement plus tragique de cette histoire.



Ziad Bakri et Yumna Marwan



L’euphorie trompeuse du Printemps arabe se trouve au cœur de ce film qui porte un regard insolite sur un événement capital de notre histoire récente, avant même l’avènement de Daesh et le phénomène de migration massive qui a suivi. La spécificité de ce film repose sur la posture pacifiste de ses auteurs qu’il n’est en aucun cas question d’assimiler à une forme quelconque de défaitisme. Derrière les mots qu’utilise le traducteur campé par Ziad Bakri, affleure en fait un engagement courageux, puisqu’au-delà des déclarations dont il se fait le porte-parole auprès de l’opinion internationale, il profite de sa fonction pour lancer une mise en garde dans ce qui s’apparente à un acte de résistance authentique. C’est tout le propos de ce film dont la révolution syrienne est davantage un levier dramatique que la thématique proprement dite. C’est à ce genre de détails qu’on reconnaît les œuvres engagées davantage que militantes.

Jean-Philippe Guerand








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