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“Le pardon” de Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha




Ghasideyeh gave sefid Film irano-français de Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha (2020), avec Maryam Moghadam, Alireza Sani Far, Pouria Rahimi, Avin Poor Raoufi, Mohammad Heidari, Farid Ghobadi, Lili Farhadpour… 1h45. Sortie le 27 octobre 2021.



Maryam Moghadam



Le cinéma iranien est décidément aussi surprenant que multiple, à en juger par les films originaires de ce pays présentés dans les festival internationaux et sortis ces derniers mois. La loi de Téhéran de Saeed Roustayi a constitué le succès surprise de l’été dernier, Un héros d’Asghar Farhadi a obtenu le Grand Prix du dernier festival de Cannes et Le pardon de Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha figurait en compétition à Berlin. Lorsque Mina découvre que son mari a été exécuté pour un crime dont il était en fait innocent, elle entreprend d’obtenir réparation auprès de la justice. Une croisade de principe qui donne l’occasion au film de plonger dans les arcanes d’un système qui ignore la demi-mesure et qui, à trop vouloir faire d’exemples, se retrouve contraint de rendre des comptes aux citoyens. Situation paradoxale sous un régime qui a érigé la répression en dogme absolu et applique la peine capitale sans toujours un discernement infaillible. Avec à la clé des erreurs judiciaires exponentielles.



Maryam Moghadam et Pouria Rahimi



La singularité du Pardon est de montrer qu’il existe une alternative à la justice des hommes, en prenant pour personnage principal une veuve déterminée à faire respecter la loi et recouvrer son honneur. Sans déflorer un dénouement vraiment radical, il convient de souligner que celui-ci recycle une scène célèbre de Soupçons (1941) d’Alfred Hitchcock, au même titre que la séquence d’ouverture du film espagnol d’Asghar Farhadi Everybody Knows se démarquait de Sueurs froides (1958) du même réalisateur. C’est dire combien les cinéastes iraniens connaissent leurs classiques, mais ne se contentent pas de les décalquer. Coréalisé par son interprète principale, Maryam Moghadam, Le pardon utilise ainsi les conventions du drame juridique pour nous proposer une réflexion en profondeur sur la notion même d’erreur judiciaire dans un pays prompt à châtier le moindre délit dans le but de faire des exemples. Mais une telle doctrine ne peut pas s’accommoder de la moindre approximation, sous peine de voir son autorité remise en cause.

Jean-Philippe Guerand





Alireza Sani Far

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