Film espagnol de Pilar Palomero (2020), avec Andrea Fandos, Natalia de Molina, Zoe Arnao, Julia Serra, Francesca Piñon, Ainara Nieto, Elisa Martinez, Carlota Gurpegui… 1h30. Sortie le 27 octobre 2021.
Collégienne dans un établissement religieux de Saragosse, la timide Celia élevée par sa veuve de mère va passer de l’enfance à l’adolescence au contact d’une nouvelle camarade en provenance de la grande ville. En situant son premier long métrage en 1992, la réalisatrice Pilar Palomero a souhaité témoigner du climat particulier qui régnait alors en Espagne où se sont déroulés simultanément les Jeux Olympiques de Barcelone et l’Exposition universelle de Séville, en donnant l’impression à certains observateurs que le pays était entré dans un nouvel âge, alors même que la plus grande partie de ses habitants évoluaient à bonne distance de ce mirage. C’est cette société patriarcale ancrée dans une tradition machiste et réactionnaire à laquelle s’attache Las niñas en adoptant la forme délicate d’une chronique d’apprentissage diffuse où des gamines doivent se soumettre à des préceptes d’une autre époque dans leurs études comme dans leur cercle familial.
Marquée par la liberté de Cría cuervos… (1976) de Carlos Saura et de L’argent de poche de François Truffaut qui ont bercé son enfance, Pilar Palomero ne décrit la puberté ni comme un paradis ni comme un enfer. Juste comme une étape déterminante dont la spécificité était alors niée par une société encore fortement traumatisée par l’ère franquiste. Elle choisit pour cela le ton de l’intimisme et décrit cette communauté de jeunes filles en uniforme comme un microcosme où se nouent des relations sociales qui conditionneront le comportement de ces futures adultes. Une observation d’autant plus juste que la réalisatrice y puise dans ses propres souvenirs et que Las niñas a obtenu quatre Goya dont meilleur film, meilleur nouveau réalisateur et meilleur scénario original qui la concernent directement. Ce film est en effet porteur d’immenses promesses par son mélange réussi de fraîcheur et de maturité. À l’image de ses jeunes interprètes dont les regards expressifs s’inscrivent dans notre mémoire pour longtemps et expriment des sentiments qu’elles ont du mal à verbaliser, faute de disposer des mots justes pour le dire.
Jean-Philippe Guerand
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