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“Winona” d’Alexander Voulgaris




Film grec d’Alexander Voulgaris (2019), avec Anthi Efstratiadou, Sofia Kokkali, Iro Bezou, Daphné Patakia, Vangelis Loukissas, Eleni Bertes, Kleio Ktena… 1h28. Mise en ligne sur les plateformes VOD le 13 septembe 2021.






Elles sont quatre jeunes filles dans une crique paradisiaque à vaquer à leurs occupations avec une complicité qui confine à la sororité. Leur insouciance fait plaisir à voir, mais on pressent qu’une ombre indéfinie plane au-dessus de cette joyeuse réunion entre copines. Jusqu’au moment où le film bascule soudainement vers une gravité inattendue. Un peu comme si ces adolescentes étaient propulsées malgré elles dans cet âge adulte qu’elles redoutent tant et qu’elles devaient tirer malgré elles un trait définitif sur leurs années d’apprentissage. C’est à partir d’émotions et de sensations anodines et intimes que la mise en scène d’Alexander Voulgaris tisse sa toile autour de ce gynécée sur lequel rien ne paraît avoir de prise. Bronzage, baignades, photos, fous rires, confidences, chansons et bavardages ponctuent cette journée à la plage qui favorise le groupe au détriment des donzelles qui le composent, toutes prénommées en référence à des stars de cinéma, puisqu’il y a là Meryl (Streep), Giulietta (Masina), Jennifer Jason (Leigh), Eiko (Matsuda, mais là on n’a que l’embarras du choix) et cette fameuse Winona (Ryder) qui manque à l’appel.






Autant être lucide, la diffusion en France de ce film grec est due à la présence parmi sa distribution de la comédienne Daphné Patakia, devenue célèbre entre-temps grâce à ses prestations remarquées dans la série d’Antony Cordier “OVNIs” et le film de Paul Verhoeven Benedetta où elle s’offrait le luxe de voler allègrement la vedette à Virginie Efira en petite nonne perverse. Elle n’est pourtant ici qu’une de ces quatre copines à lunettes réunies pour un mystérieux rituel convivial, moins innocent qu’il ne pourrait y sembler de prime abord. Reste qu’elle se détache de ce groupe par un atout maître, son regard, et qu’elle constitue la meilleure raison de se laisser aller à cette heure et demie qui distille quelques vérités inattendues sur des thèmes universels. L’escale mérite le détour et surprend par sa gravité au sein de plateformes généralement plus dispendieuses d’œuvres légères et clinquantes sinon superficielles et glamour.

Jean-Philippe Guerand





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