Accéder au contenu principal

“La cure” de Simon Rembado et Clément Schneider




Film français de Simon Rembado et Clément Schneider (2021), avec Simon Bourgade, Sarah Brannens, Étienne Durot, Yeelem Jappain, Angèle Peyrade, Antoine Prud’homme de La Boussinière, Simon Rembado, Loïc Renard… 1h42. Sortie le 8 septembre 2021.






Brillante idée que de prendre comme prétexte dramatique “Les enfants du soleil” pièce écrite par Maxime Gorki en 1905, mais située durant l’épidémie de choléra de 1862, pour évoquer notre époque troublée par la pandémie de Covid-19 et ses confinements à répétition. Des Parisiens vont se mettre au vert, en espérant vivre plus librement en dehors du monde dit civilisé et de ses contraintes. Il y a là un couple et la jeune sœur de monsieur qui nécessite des soins thérapeutiques quotidiens. Et puis aussi des intrus qui vont s’ingénier à mettre le feu aux poudres en dynamitant l'harmonie de façade de ces reclus confrontés pour la plupart à des échecs qu’ils se refusent à assumer. Au-delà de cette situation, La cure dessine les contours de cet antagonisme qui existe entre la toute-puissance de Paris et une France rurale qui semble évoluer sur une planète lointaine. Chacun campe sur ses préjugés et considère celui qui lui fait face comme extravagant, toujours prompt à déceler chez les autres des défauts auxquels il ne prêterait sans doute pas la moindre attention s’ils l’affectaient personnellement.






La cure séduit par son humilité, nourrie elle-même par la fraîcheur de ses interprètes, peu ou pas connus des spectateurs de cinéma. Le film évite par ailleurs les pièges du théâtre filmé en jouant des allers et venues entre l’intérieur de la maison et son jardin, sans toutefois jamais s’aventurer vraiment au-delà de ce territoire soigneusement circonscrit. Très vite, les aléas de la cohabitation entre ces citadins se trouvent dépassés par des considérations autrement plus universelles, la plupart d’entre eux se trouvant confrontés à des situations devant lesquelles ils se dérobent depuis des lustres. À commencer par ce pur esprit snobinard et son épouse délaissée, confrontés l’un et l’autre à des soupirants bien déterminés à tenter leur chance une fois pour toutes. La peinture de ces Parisiens est cruelle mais juste. Celle des villageois est moins convaincante, à l’instar de ce paysan arriéré qui avoue battre sa femme et détonne par son aspect caricatural avec la vérité humaine qui baigne le film. Reste que ce film est l’un des premiers à aborder aussi frontalement l’ère de la Covid-19 et un “monde d’après” désespérément identique à celui d’avant, avec ses promesses non tenues et sa mesquinerie endémique.

Jean-Philippe Guerand





Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Le paradis des rêves brisés

La confession qui suit est bouleversante… © A Medvedkine Elle est le fait d’une jeune fille de 22 ans, Anna Bosc-Molinaro, qui a travaillé pendant cinq années à différents postes d’accueil à la Cinémathèque Française dont elle était par ailleurs une abonnée assidue. Au-delà de ce lieu mythique de la cinéphilie qui confie certaines tâches à une entreprise de sous-traitance aux méthodes pour le moins discutables, CityOne (http://www.cityone.fr/) -dont une responsable non identifiée s’auto-qualifie fièrement de “petit Mussolini”-, sans nécessairement connaître les dessous répugnants de ses “contrats ponctuels”, cette étudiante éprise de cinéma et idéaliste s’est retrouvée au cœur d’un mauvais film des frères Dardenne, victime de l'horreur économique dans toute sa monstruosité : harcèlement, contrats précaires, horaires variables, intimidation, etc. Ce n’est pas un hasard si sa vidéo est signée Medvedkine, clin d’œil pertinent aux fameux groupes qui signèrent dans la mouva

Bud Spencer (1929-2016) : Le colosse à la barbe fleurie

Bud Spencer © DR     De Dieu pardonne… Moi pas ! (1967) à Petit papa baston (1994), Bud Spencer a tenu auprès de Terence Hill le rôle de complice qu’Oliver Hardy jouait aux côtés de Stan Laurel. À 75 ans et après plus de cent films, l’ex-champion de natation Carlo Pedersoli, colosse bedonnant et affable, était la surprenante révélation d’ En chantant derrière les paravents  (2003) d’Ermanno Olmi, Palme d’or à Cannes pour L’arbre aux sabots . Une expérience faste pour un tournant inattendu au sein d’une carrière jusqu’alors tournée massivement vers la comédie et l’action d’où émergent des films comme On l’appelle Trinita (1970), Deux super-flics (1977), Pair et impair (1978), Salut l’ami, adieu le trésor (1981) et les aventures télévisées d’ Extralarge (1991-1993). Entrevue avec un phénomène du box-office.   Rencontre « Ermanno Olmi a insisté pour que je garde mon pseudonyme, car il évoque pour lui la puissance, la lutte et la violence. En outre, c’était

Jean-Christophe Averty (1928-2017) : Un jazzeur sachant jaser…

Jean-Christophe Averty © DR Né en 1928, Jean-Christophe Averty est élève de l'Institut des Hautes Etudes Cinématographiques (Idhec) avant de partir travailler en tant que banc-titreur pour les Studios Disney de Burbank où il reste deux ans en accumulant une expertise précieuse qu'il saura mettre à profit par la suite. De retour en France, il intègre la RTF en 1952 où il réalisera un demi-millier d'émissions de radio et de télévision dont Les raisins verts (1963-1964) qui assoit sa réputation de frondeur à travers l'image récurrente d'une poupée passé à la moulinette d'un hachoir à viande et pas moins de 1 805 numéros des Cinglés du music-hall (1982-2006) où il exprime sa passion pour la musique, sur France Inter, puis France Culture, lui, l'amateur de jazz à la voix inimitable chez qui les mots semblent se bousculer. Fin lettré et passionné par les images, l’iconoclaste Averty compte parmi les pionniers de la vidéo et se caract