Accéder au contenu principal

“La terre des hommes” de Naël Marandin




Film français de Naël Marandin (2019), avec Diane Rouxel, Finnegan Oldfield, Jalil Lespert, Olivier Gourmet, Bruno Raffaelli, Clémence Boisnard, Samuel Churin, Sophie  Cattani… 1h36. Sortie le 25 août 2021.



Diane Rouxel et Finnegan Oldfield



Longtemps absent des écrans, le monde rural est revenu à l’ordre du jour avec le retentissement consécutif de trois premiers films remarqués : Petit paysan (2017) d’Hubert Charuel, Au nom de la terre (2019) d’Édouard Bergeon et dans une certaine mesure La nuée (2020) de Just Philippot. Comme si, tout d’un coup, les Français ressentaient la nécessité de renouer avec leurs racines paysannes autour du malaise grandissant d’une communauté devenue minoritaire qui a inspiré bon nombre de classiques, de Goupi mains rouges (1943) de Jacques Becker à Jour de fête (1949) de Jacques Tati et Alexandre le bienheureux (1968) d’Yves Robert, en passant par Farrebique (1946) et Biquefarre (1983) de Georges Rouquier et la trilogie Profils paysans (2001, 2005, 2008) de Raymond Depardon. Situé dans l’univers spécifique des éleveurs, aussi pressurés que les agriculteurs, La terre des hommes est un constat sans appel sur la situation actuelle de ceux qui nous nourrissent, confrontés simultanément à la grippe aviaire, la montée en puissance de l’écologie et une paupérisation qui s’est traduite par une recrudescence des suicides. Avec en prime, une dénonciation en règle du harcèlement sexuel comme une pérennisation du droit de cuissage…



Olivier Gourmet et Diane Rouxel



La terre des hommes s’attache à une femme contrainte de se battre pour s’imposer dans un monde dominé par les hommes depuis des générations, thématique déjà abordée dans un tout autre contexte par le réalisateur dans son premier long métrage, La marcheuse (2016). Désireuse de préserver de la faillite l’exploitation agricole de son père, Constance entraîne son fiancé dans une croisade contre les gros propriétaires où son plus puissant allié va lui faire payer son soutien au prix fort. C’est après s’être immergé dans le milieu de l’élevage que Naël Marandin a écrit ce film qui dénonce à la fois un univers impitoyable et le machisme assumé qui y règne. Il a trouvé une interprète idéale en la personne de Diane Rouxel, déjà remarquée pour un emploi de femme confrontée à un monde viril dans Volontaire d’Hélène Fillières. Une taiseuse déterminée qui résiste en silence à des pratiques d’un autre âge avec la fougue d'une bête sauvage. C’est même le prix de sa survie et de son honneur dans ce film âpre inscrit dans le réel et tourné dans le sud de la Bourgogne qui a l'insigne mérite de remettre les pendules à l'heure, mais sans le moindre misérabilisme.

Jean-Philippe Guerand





Diane Rouxel

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Le paradis des rêves brisés

La confession qui suit est bouleversante… © A Medvedkine Elle est le fait d’une jeune fille de 22 ans, Anna Bosc-Molinaro, qui a travaillé pendant cinq années à différents postes d’accueil à la Cinémathèque Française dont elle était par ailleurs une abonnée assidue. Au-delà de ce lieu mythique de la cinéphilie qui confie certaines tâches à une entreprise de sous-traitance aux méthodes pour le moins discutables, CityOne (http://www.cityone.fr/) -dont une responsable non identifiée s’auto-qualifie fièrement de “petit Mussolini”-, sans nécessairement connaître les dessous répugnants de ses “contrats ponctuels”, cette étudiante éprise de cinéma et idéaliste s’est retrouvée au cœur d’un mauvais film des frères Dardenne, victime de l'horreur économique dans toute sa monstruosité : harcèlement, contrats précaires, horaires variables, intimidation, etc. Ce n’est pas un hasard si sa vidéo est signée Medvedkine, clin d’œil pertinent aux fameux groupes qui signèrent dans la mouva

Bud Spencer (1929-2016) : Le colosse à la barbe fleurie

Bud Spencer © DR     De Dieu pardonne… Moi pas ! (1967) à Petit papa baston (1994), Bud Spencer a tenu auprès de Terence Hill le rôle de complice qu’Oliver Hardy jouait aux côtés de Stan Laurel. À 75 ans et après plus de cent films, l’ex-champion de natation Carlo Pedersoli, colosse bedonnant et affable, était la surprenante révélation d’ En chantant derrière les paravents  (2003) d’Ermanno Olmi, Palme d’or à Cannes pour L’arbre aux sabots . Une expérience faste pour un tournant inattendu au sein d’une carrière jusqu’alors tournée massivement vers la comédie et l’action d’où émergent des films comme On l’appelle Trinita (1970), Deux super-flics (1977), Pair et impair (1978), Salut l’ami, adieu le trésor (1981) et les aventures télévisées d’ Extralarge (1991-1993). Entrevue avec un phénomène du box-office.   Rencontre « Ermanno Olmi a insisté pour que je garde mon pseudonyme, car il évoque pour lui la puissance, la lutte et la violence. En outre, c’était

Jean-Christophe Averty (1928-2017) : Un jazzeur sachant jaser…

Jean-Christophe Averty © DR Né en 1928, Jean-Christophe Averty est élève de l'Institut des Hautes Etudes Cinématographiques (Idhec) avant de partir travailler en tant que banc-titreur pour les Studios Disney de Burbank où il reste deux ans en accumulant une expertise précieuse qu'il saura mettre à profit par la suite. De retour en France, il intègre la RTF en 1952 où il réalisera un demi-millier d'émissions de radio et de télévision dont Les raisins verts (1963-1964) qui assoit sa réputation de frondeur à travers l'image récurrente d'une poupée passé à la moulinette d'un hachoir à viande et pas moins de 1 805 numéros des Cinglés du music-hall (1982-2006) où il exprime sa passion pour la musique, sur France Inter, puis France Culture, lui, l'amateur de jazz à la voix inimitable chez qui les mots semblent se bousculer. Fin lettré et passionné par les images, l’iconoclaste Averty compte parmi les pionniers de la vidéo et se caract