Summer of Soul (…or, When the Revolution Could Not Be Televised) Documentaire musical américain d’Ahmir “Questlove” Thompson (2020), avec B. B. King, Abbey Lincoln, Stevie Wonder, Nina Simone, Gladys Knight and the Pips, Mahalia Jackson, The Staples Singers, Max Roach… 1h58. Mise en ligne le 30 juillet 2021 sur Disney+.
B. B. King
Pour tous les amateurs de musique, l’été 1969 fut celui du concert de Woodstock. Prix du public et Grand Prix du jury au festival de Sundance 2021, Summer of Love nous révèle qu’au même moment s’est déroulé un événement alternatif qui a attiré trois cent mille Afro-Américains dans le cadre de la troisième édition du Harlem Cultural Festival, un concert adoubé par la présence du maire de New York John Lindsay en pleine campagne de réélection et retombé instantanément dans l’oubli. Ce sont ces images demeurées inédites depuis un demi-siècle qui constituent le corpus de ce témoignage inestimable sur un événement majeur de la Pop Culture auquel la présence des activistes des Black Panthers, venus suppléer la police municipale qui avait refusé d’assurer le service d’ordre, risquait de donner un impact politique qui risquait de détonner dans l’Amérique en ébullition de Richard Nixon déchirée entre le Flower Power et les manifestations contre la guerre du Vietnam. Tel est le sujet de ce film dont le sous-titre cerne bien l’enjeu : Quand la révolution ne pouvait pas être télévisée.
C’est en puisant parmi une quarantaine d’heures d’archives que le journaliste spécialisé Ahmir Thompson a réussi à reconstituer cet événement majeur organisé au Mount Morris Park par le chanteur Tony Lawrence pendant plusieurs semaines et par tous les temps. Se succèdent notamment sur scène au cours de six concerts échelonnés du 29 juin au 24 août B. B. King, Abbey Lincoln, Stevie Wonder, Nina Simone, Gladys Knight & the Pips, Mahalia Jackson, The Staples Singers, Sly & the Family Stone, Max Roach, David Ruffin et Ray Barretto où affleure comme un leitmotiv le fameux son de la mythique Motown. Avec entre-temps des discussions, des débats et des prises de parole comme celle de l’activiste Jesse Jackson, mais aussi la contribution d’artistes venus de Cuba ou de Porto Rico qui ont marqué leur époque.
À la longue lutte pour les droits civiques, succède un combat dont l’enjeu est une cohabitation interraciale pacifiée dans une Amérique où les spectres de l’esclavage et du Ku Klux Klan sont encore vivaces. En attestent des images d’archive qui soulignent la difficulté du contexte au sein d’une Amérique qui n’arrivait à s’unir que pour lutter contre l’injustice sociale et la ségrégation raciale. Ces prestations artistiques mémorables sont par ailleurs commentées et contextualisées par des témoins de l’époque, certains artistes que cet événement a marqués à jamais, mais aussi des spectateurs plus ou moins anonymes, à l’image de Sheila E, la future protégée de Prince. Avec en filigrane, l’événement fondamental qui rendit cet été inoubliable pour tous les Terriens : les premiers pas de l’homme sur la Lune.
Jean-Philippe Guerand
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