The United States vs. Billie Holiday Film américain de Lee Daniels (2020), avec Andra Day, Trevante Rhodes, Garrett Hedlund, Leslie Jordan, Miss Lawrence, Adriane Lenox, Natasha Lyonne, Rob Morgan… 2h08. Sortie le 2 juin 2021.
De la chanteuse à la voix déchirante Billie Holiday, on connaît la carrière en forme de chemin de croix évoquée récemment dans le documentaire de James Erskine, Billie. On découvre grâce à Lee Daniels à quel point le FBI lui a cherché des noises en la considérant comme la voix de la communauté afro-américaine, avant même que la lutte pour les droits civiques ne devienne une cause nationale véritablement audible. Sa vie a été un véritable calvaire. Et puis, en 1939, elle a chanté avec “Strange Fruit” un véritable hymne à la souffrance des gens de couleur dans une Amérique jamais remise de la Guerre de Sécession, en évoquant un lynchage. Un réquisitoire contre le racisme qui lui vaut d’entrer dans le collimateur des autorités. Dès lors, sa carrière deviendra un enfer sur lequel veille un agent du Bureau fédéral des narcotiques qui va succomber à son charme.
C’est un aspect méconnu de la destinée de Billie Holiday qu’explore ce film, en s’attachant moins à une chanteuse de jazz exceptionnelle qu’aux passions qu’elle a déchaînées en accédant à la gloire. À travers la destinée de cette martyre qui n’aurait sans doute pas chanté avec autant de ferveur et d’intensité si on l’avait laissée en paix, c’est aussi l’Amérique paranoïaque des années 40 et 50 que décrit ce biopic sur fond de ségrégation raciale. Avec dans le rôle de la diva une révélation, la chanteuse de R&B Andra Day dont c’est le premier rôle à l’écran. Sa performance est d’autant plus remarquable qu’elle comporte un véritable défi sur le plan dramatique qui semble lui promettre un brillant avenir au cinéma. On pourra reprocher légitimement à Lee Daniels de manquer d’inspiration dans sa mise en scène, mais le réalisateur de Precious (2009) n’a jamais brillé par cette caractéristique. Il possède en revanche une détermination militante qui lui a déjà valu de se frotter à des sujets délicats, avec une prédilection pour le mélo parfois contre-productive. Il lui sera toutefois beaucoup pardonné pour avoir remis en lumière la géniale Billie Holiday.
Jean-Philippe Guerand
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