Stowaway Film américain de Joe Penna (2020), avec Anna Kendrick, Toni Collette, Daniel Dae Kim, Shamier Anderson… 1h56. Mise en ligne sur Netflix le 22 avril 2021.
Shamier Anderson, Anna Kendrick,
Daniel Dae Kim et Toni Collette
Les trois occupants d’une navette spatiale pour Mars découvrent que leur vaisseau héberge un passager clandestin. Cas de conscience terrible, car la présence de cet intrus met en péril leurs réserves, qu’il s’agisse de nourriture ou d’oxygène. Dès lors, il va leur falloir trouver une solution à ce problème arithmétique qui devient malgré eux un cas de vie ou de mort. Révélé par son premier long métrage, Arctic (2018), présenté en séance spéciale au festival de Cannes, le Brésilien Joe Penna est devenu célèbre en fidélisant trois millions d’abonnés sur sa chaîne Youtube. Passé par la pub, le clip et le court métrage, il confirme son intérêt pour les univers “Bigger than Life”, en circonscrivant le sujet de son nouveau film dans l’espace clos d’une navette spatiale plutôt banalisée d’où l’apesanteur a été bannie et où le port de la combinaison n’est requis que dans certaines circonstances. Une approche résolument contemporaine qui se conjugue avec une autre caractéristique moderne : l’équipage initial est composé de deux femmes et d’un homme d’origine asiatique, celui par qui le dilemme arrive étant pour sa part afro-américain. C’est donc sous le signe de la diversité que Penna place ce huis clos qui ne relève en fait ni de la science-fiction ni du fantastique, contrairement à la plupart des films situés dans un tel cadre, mais plutôt de la psychologie pure.
Le passager n°4 nous invite à une réflexion beaucoup plus profonde qu’il ne pourrait y paraître de prime abord. Les espaces infinis qui nous entourent constituent désormais un décor presque comme les autres dans lequel peuvent s’inscrire des films de genre. Le postulat est élémentaire, son traitement emprunte à la psychologie et au polar traditionnel. Le passager n°4 entérine une banalisation des voyages intersidéraux et constitue une sorte de contre-poison à la vogue des space operas. Comme dans le récent Minuit dans l’univers de George Clooney, l’extraordinaire s’est normalisé, mais cette routine possède elle aussi ses dangers. Le suspense repose quant à lui sur une mécanique à l’épreuve du temps et de l’espace. Le casting est d’ailleurs représentatif de l’esprit frondeur du film puisqu’il a pour interprètes principales deux actrices a priori à des années-lumière de cet univers : l’actrice australienne Toni Collette et Anna Kendrick, révélée naguère par la saga Twilight. Comme Sandra Bullock dans Gravity (2013) d’Alfonso Cuarón, elles donnent un sacré surcroît d’humanité à ce huis clos perdu au fin fond de la galaxie dans lequel il est avant tout question de survie. En choisissant pour personnages deux femmes et deux représentants de la diversité, Penna a pris le risque de s’exposer à des critiques au cas où il ait sacrifié l’une plutôt que l’autre sans justification dramatique suffisante. Il évacue habilement cet écueil en se concentrant sur les enjeux purement dramatiques de ce cas de conscience collectif. Le tour de passe-passe est habile à souhait.
Jean-Philippe Guerand
Toni Collette et Shamier Anderson
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