The Midnight Sky Film américain de George Clooney (2020), avec George Clooney, Felicity Jones, Kyle Chandler, David Oyelowo, Demian Bechir, Tiffany Boone, Caoilinn Springall… 2h02. Mise en ligne sur Netflix le 23 décembre 2020.
Le rapport de George Clooney à la science-fiction est des plus particuliers. Il s’appuie sur deux œuvres majeures : la version de Solaris réalisée en 2002 par Steven Soderbergh et Gravity (2013) d’Alfonso Cuarón. Inspiré du roman de Lily Brooks-Dalton Good Morning, Midnight paru en 2016, et adapté par le scénariste orfèvre de The Revenant (2015), Mark L. Smith, Minuit dans l’univers marque la première incursion personnelle dans ce domaine de l’acteur en tant que metteur en scène. D’emblée, il circonscrit son territoire : une étendue glacée où un homme au bout du rouleau (Clooney hâve et barbu, de retour sur ce grand écran qu'il avait dédaigné depuis Money Monster) prend sous sa protection une petite fille égarée et entre difficilement en communication avec un vaisseau spatial de retour vers la terre. Dans l’espace, tout est tranquille. Dans l’Arctique, tout est immaculé. Ailleurs, c’est l’apocalypse, suite à une mystérieuse catastrophe planétaire dont on ne saura rien de précis. Minuit dans l’univers est un film du hors-champ dans lequel les événements ne sont perçus qu’en fonction de leurs conséquences et de la menace lointaine qu’ils font planer sur des survivants coupés les uns des autres. En période de pandémie, le message du film revêt une portée universelle.
Contrairement aux Fils de l’homme (2006) d’Alfonso Cuarón, La route (2009) de John Hillcoat ou, sur un registre plus intimiste, Light of My Life (2019) de Casey Affleck, Minuit dans l’univers ne s’attache qu’aux survivants et aux efforts qui vont leur permettre de maintenir un lien social, aussi ténu soit-il. La catastrophe est hors-champ. Entouré de sa garde rapprochée, de son associé producteur Grant Heslov au compositeur Alexandre Desplat, George Clooney n’émerge de sa zone de confort apparente que pour aborder des thèmes qui lui tiennent particulièrement à cœur et souligner l’importance de la résilience dans un monde dévasté. L’une des particularités du film est de se dérouler dans deux univers distincts : la calotte glaciaire où un scientifique à l’agonie se bat pour sauver une gamine qui incarne à elle seule la survie de l’espèce et ce vaisseau spatial dont les astronautes ne pourront échapper à la mort que s’ils trouvent une alternative à leur retour sur terre. La problématique est donc philosophico-existentielle sinon pascalienne. Voici décidément un conte de science-fiction bien atypique qui pose davantage de questions qu’il n’y répond, avec un masochisme consommé de la part de son acteur et réalisateur qu'on a rarement vu aussi sombre. Mais c’est aussi parfois la loi du genre.
Jean-Philippe Guerand
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