Il peccato Film russo-italien d’Andrei Konchalovsky (2019), avec Alberto Testone, Jakob Diehl, Francesco Gaudiello… 2h16. Sortie le 21 octobre 2020.
Alberto Testone
Pour le commun des mortels, Michel-Ange, c’est cet artiste qui a peint le plafond de la chapelle Sixtine dans des conditions acrobatiques. Une image perpétuée à l’écran par L’extase et l’agonie (1965) de Carol Reed, avec Charlton Heston dans le rôle du démiurge. Rien de tout cela dans le portrait qu’en dresse Andreï Konchalovsky, en décrivant un homme profondément en symbiose avec son époque qui prend le temps de vivre afin de nourrir sa créativité, tandis que deux familles de la noblesse se disputent ses faveurs. Le réalisateur russe a choisi pour camper cette personnalité hors du commun, non pas un boxeur comme il l’avait envisagé, mais un dentiste italien au nez cassé devenu acteur et scénariste, Alberto Testone, qui exprime à la perfection cette flamme dévorante, à travers un regard d’une intensité impressionnante. Son visage est pour le metteur en scène un véritable paysage qui reflète les états d’âme successifs d’un esprit en fusion permanente qui répond aux foudres de l’Inquisition en transformant des morceaux de marbre monumentaux en des sculptures d’une pureté admirable.
Comme son compagnon de jeunesse Andreï Tarkovski (avec lequel il avait écrit le biopic du peintre Andreï Roublev) avait choisi de passer la fin de sa trop brève existence en Italie, Andreï Konchalovsky accomplit un authentique pèlerinage cinématographique dans la patrie de Roberto Rossellini et de Pier Paolo Pasolini (auquel ressemble physiquement son Michel-Ange qui lui a d’ailleurs consacré un documentaire et a même tenu son rôle à l’écran). Le titre original de son film donne sa tonalité : Il peccato, c’est le péché. Sa démarche consiste à montrer comment la Renaissance est parvenue à exalter la beauté comme jamais, malgré la barbarie ambiante. On peut aussi considérer ce portrait dans un miroir comme une tentative autobiographique par procuration de la part de son auteur qui a lui-même dû transiger avec la censure sous l’ère soviétique. Bref, ce film est construit à la façon de ces poupées russes qui en cachent tant d’autres.
Jean-Philippe Guerand
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