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“Maternal” de Maura Delpero



Film italo-argentin de Maura Delpero (2019), avec Lidiya Liberman, Denise Carrizo, Agustina Malale… 1h29. Sortie le 7 octobre 2020.





Dans un foyer pour mères adolescentes de Buenos-Aires, une jeune novice italienne sur le point de prononcer ses vœux est confrontée à une réalité violente au contact de femmes de son âge dont tout semble la séparer, certaines soumises, d’autres plus rebelles. Pour son premier film de fiction, la réalisatrice Maura Delpero confronte deux mondes que le cinéma nous a habitués à évoquer séparément autour du thème de la sororité qu’elle a elle-même abordé dans plusieurs documentaires. En l’occurrence ici celui des filles-mères livrées à elles-mêmes et mises au ban d’une société qui perpétue une longue tradition catholique et celui de ces jeunes femmes qui décident d’entrer dans les ordres et de se retirer ainsi du monde pour se consacrer aux déshérité(e)s. Le choc de ces deux univers s’avère ici plutôt subtil et passe par un casting impeccable des trois actrices principales.





Comme l’indique son titre, Maternal est une réflexion sur la maternité qui prend pour cadre un pays où l’avortement est encore prohibé, en l’occurrence l’Argentine où l’abolition récente de cette loi inique (intervenue postérieurement au tournage du film de Maura Delpero) a inspiré récemment à Juan Solanas le documentaire choc Femmes d’Argentine (2019). D’un côté, il y a deux “pécheresses” : l’une qui prend soin de son bébé, l’autre qu’elle protège et qui se désintéresse de son enfant pour brûler sa vie par les deux bouts. De l’autre, il y a cette novice d’une beauté rayonnante que leur situation bouleverse au point de remettre en question son engagement. Cette confrontation nourrit une réflexion subtile sur les poids comparés de l’inné et de l’acquis dans la maternité, sans jamais chercher pour autant à imposer une vérité univoque. Sans doute parce que ce film délicat qui évite les pièges réducteurs du manichéisme est l’aboutissement de quatre ans de préparation de la part de sa réalisatrice.

Jean-Philippe Guerand






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