Film français de Maïwenn (2020), avec Maïwenn, Fanny Ardant, Louis Garrel, Dylan Robert, Omar Marwan, Caroline Chaniolleau, Marine Vacth… 1h30. Sortie le 28 octobre 2020.
L’œuvre toute entière de Maïwenn ressemble à un cycle de séances de psychanalyse qui ont la suprême élégance de faire du bien aux spectateurs sans qu’on sache toutefois si elles contribuent simultanément à soulager l’actrice-réalisatrice de ses écrasantes névroses familiales. En l’occurrence, dans ADN, la disparition d’un grand-père charismatique venu naguère d’Algérie précipite ses descendants dans une période de doute collectif, malgré une intégration dans la société française qu’on pourrait qualifier de parfaite. Cette absence soudaine du guide spirituel de la tribu suscite des réactions diverses et parfois un questionnement identitaire sinon existentiel. Pour savoir qui on est vraiment, il convient d’établir précisément d’où l’on vient. C’est la quête dans laquelle se lance Neige quand disparaît l’homme qui l’a élevée en la mettant à l’abri de ses parents aussi toxiques qu’égocentriques. Un parcours du combattant semé d’embûches qui va engendrer un séisme familial aux conséquences individuelles démesurées.
Maïwenn, Henry-Noël Tabary, Caroline Chaniolleau,
Dylan Robert, Fanny Ardant et Louis Garrel
Comme dans Pardonnez-moi, où elle mettait un (son ?) père en accusation avec une rare violence, Maïwenn s’en prend à la figure du géniteur, mais n’en ménage pas pour autant sa mère dont elle partage le caractère excessif, mais refuse de reprendre à son compte une excentricité qui sert de cache-misère à une irresponsabilité immature. À travers ce portrait de groupe avec dames dont le centre de gravité ne cesse de se déplacer au fil des événements, la réalisatrice de Polisse s’attaque aussi à ce fragile équilibre qui s’établit chez chacun de nous entre l’inné et l’acquis. Quitte à identifier ses racines avec précision pour se mettre enfin en paix avec elle-même et à transmettre à ses trois enfants une ascendance clairement délimitée. ADN fait partie de ces œuvres personnelles qui atteignent miraculeusement à l’universalité, tant les sentiments qui s’y expriment sonnent juste. C’est d’ailleurs l’une des qualités cardinales de Maïwenn de s’exposer en première ligne, sans laisser à une autre le soin de tenir son propre rôle, aussi douloureux puissent être les dégâts collatéraux de cette mise à nu parfois déchirante mais le plus souvent cocasse.
Jean-Philippe Guerand
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