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"Pierre Cardin" de Todd Hughes et P. David Ebersole



House of Cardin Documentaire américano-français de Todd Hughes et P. David Ebersole (2019), avec Pierre Cardin, Jean-Paul Gaultier, Philippe Starck… 1h35. Sortie le 23 septembre 2020.




Ces derniers temps, plusieurs créateurs de mode et couturiers ont fait l’objet de documentaires d’une qualité remarquable à l’occasion desquels le cinéma a souhaité prendre une certaine hauteur par rapport à ce monde fantasmatique. Sans atteindre la richesse esthétique bluffante du McQueen de Ian Bonhôte et Peter Ettedgui, l’évocation par les américains Todd Hughes et P. David Ebersole du doyen de l’école française, dont on réalise qu’il est aussi l’une des personnalités françaises les plus célèbres de la planète, s’impose par sa richesse et la multiplicité de ses angles croisés. Longtemps éclipsé par Yves Saint-Laurent et ses deux biopics médiatisés, voire le très narcissique Karl Lagerfeld, Pierre Cardin est restitué ici à travers une carrière exceptionnelle d’où émergent à la fois son génie de touche-à-tout et son instinct d’homme d’affaires.




Sans jamais sombrer dans les pièges de l’hagiographie, et bien que le couturier ait évidemment encouragé cette entreprise dotée de moyens conséquents, ainsi que l’attestent la richesse des témoignages et l’abondance des lieux de tournage, ce documentaire dresse un portrait saisissant de cet artiste qui a exploré de multiples univers avec une seule obsession : innover. Y affleure l’esprit en ébullition permanente d’un créateur qui a mis son esprit d’entreprise au service de son nom pour l’imposer comme une marque déposée avant de la décliner sous des formes innombrables. Non seulement il n’a jamais cessé de remettre sur le métier son ouvrage, mais il a su le renouveler en permanence en s’adaptant à son époque, souvent même en l’anticipant, comme l’attestent ici les images d’archive, mais aussi ses collaborateurs, ses admirateurs et ses épigones. Pierre Cardin se garde d’autant moins de figer son sujet en statue du commandeur que ce pionnier de la mode futuriste garde toujours quelques longueurs d’avance sur son temps. C’est même la morale de ce biopic documentaire.
Jean-Philippe Guerand



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