Film français de Sophie Letourneur (2019), avec Marina Foïs, Jonathan Cohen, Jacqueline Kakou… 1h41. Sortie le 2 septembre 2020.
Marina Foïs
Le point de départ peut sembler saugrenu. Une pianiste consacre toute sa vie à sa carrière que gère pour elle son époux et impresario qu’elle suit aveuglément, tant il la materne dans chacun des gestes de sa vie quotidienne. Jusqu’au moment où celui-ci lui fait… un enfant dans le dos. Alors que l’équilibre de leur couple a toujours reposé sur le fait qu’ils étaient d’accord pour ne jamais avoir d’enfant, il la place malgré elle dans une situation impossible qu’elle met un certain temps à assumer et même simplement à comprendre, son mari assumant à sa place ses multiples contraintes de future mère avec une jubilation touchante. Grossissant le trait à dessein, Sophie Letourneur signe une comédie inattendue sur la maternité et s’autorise des scènes franchement surréalistes où la virtuose se complaît dans un déni de grossesse d’anthologie. Jusqu’à une scène d’accouchement qui restera dans les annales.
Jonathan Cohen et Marina Foïs
À l’image de son titre, particulièrement pertinent, Énorme ne craint jamais de forcer le trait et d’embarquer le spectateur dans sa folie. Quitte à mettre les deux personnages principaux dans des situations souvent extravagantes et à distiller des propos politiquement incorrects sur le désir d’enfant et la maternité qu’aucun homme n’aurait pu filmer sans se faire taxer de misogynie. C’est tout le miracle de cette pochade narquoise et caustique d’aller à contre-courant des idées reçues en osant prendre pour protagonistes un homme frustré de pas pouvoir enfanter (Jonathan Cohen, dans la lignée du Marcello Mastroianni de L’événement le plus important depuis que l’homme a marché sur la lune) et une femme intégralement dévouée à son ambition professionnelle (Marina Foïs, évaporée à souhait qui prend le risque suprême de se montrer franchement antipathique). Au sein du terrain trop balisé de la comédie française, qui a prospéré ces derniers mois en colmatant la défaillance des productions américaines aux abonnés absents, Énorme fait souffler un vent revigorant d’audace et d’insolence.
Jean-Philippe Guerand
Jonathan Cohen
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