Film français d’Amro Hamzawi (2020), avec Nora Hamzawi, André Marcon, Julia Faure… 1h24. Sortie le 23 septembre 2020.
Trimbalant avec elle le poids de son mal être de trentenaire en quête du prince charmant, sous la surveillance rapprochée de sa mère et de sa sœur, Éléonore a toujours rêvé de vivre de sa plume, mais se voit contrainte de réviser son plan de carrière à la baisse en acceptant un poste d’assistante à tout faire dans une maison d’édition d’ouvrages érotiques qui table moins sur sa renommée littéraire que sur les frustrations sexuelles de sa clientèle. Affectée d’une irrésistible maladresse, cette incorrigible idéaliste biberonnée à une culture vertueuse d’un autre âge, où la littérature est sacralisée comme un sacerdoce, rate à peu près tout ce qu’elle entreprend, faite d’aller au bout de ses envies et d'accepter la moindre compromission. Jusqu’au jour où elle réalise que c’est parmi ses névroses encombrantes qu’il lui faut puiser son inspiration, au lieu de chercher à les guérir.
Il y a chez cette paumée magnifique que campe Nora Hamzawi dans le premier film de son frère Amro une sorte de double féminin du personnage incarné par Woody Allen dans ses comédies de jeunesse où il avait encore Diane Keaton pour muse et partenaire. Éléonore s’impose en effet comme une comédie juive new-yorkaise made in Paris qui jongle avec un humour sous influence freudienne pour dépeindre un mal de vivre qui dévaste tout autour de lui. Entraperçue dans Doubles vies d’Olivier Assayas, où elle incarnait la compagne d’un écrivain en crise, avec son débit de voix de mitraillette, la fantaisiste Nora Hamzawi excelle sur le registre pince-sans-rire, au point de nous attendrir par ses états d’âme d’adolescente attardée. L’exact opposée d’André Marcon en survivant passablement désabusé d’une république des lettres en déclin, avec sa mine de Droopy irrésistible et son cynisme bien tempéré. Éléonore est un premier film prometteur et facétieux qui remplit toutes ses promesses et donne envie de revoir à l’œuvre rapidement Nora et Amro Hamzawi, ensemble ou séparément.
Jean-Philippe Guerand
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