Accéder au contenu principal

"Family Romance, LLC" de Werner Herzog



Film américain de Werner Herzog (2019), avec Miki FujimakiUmetani HideyasuShun Ishigaki… 1h29. Sortie le 19 août 2020.




Un homme rencontre parmi les cerisiers en fleurs une jeune fille à qui il déclare tout de go être le père qu’elle n’a jamais connu. En fait, il joue un rôle et a été engagé par sa mère pour combler un manque affectif. Au fil de leurs rendez-vous, une véritable relation filiale s’instaure qui va inciter la commanditaire un rien mythomane à proposer à l’imposteur de l’épouser pour reconstituer une sorte de famille idéale. À Tokyo, il existe une société qui loue ses services dans les circonstances les plus folles. Ainsi cet employé des chemins de fer contraint de se mettre à genoux devant son supérieur pour avoir fait partir un train avec deux minutes d’avance et séparé une mère de son enfant, l’un étant resté sur le quai alors que l’autre était déjà à bord du convoi.




Family Romance, LLC s’impose comme l’un des documentaires les plus fous jamais réalisés par Werner Herzog qui y décrit cette société japonaise si mal à l’aise avec les sentiments qu’elle a eu l’idée saugrenue d’inventer ces mercenaires du cœur rémunérés pour intervenir dans des circonstances souvent extrêmes. Tout s’achète et tout se vend dans ce monde déroutant. Au point que le patron de la société Family Romance se rend dans un hôtel tenu par des robots, avec l’idée d’adapter les ressources de la cybernétique à son activité. Idée ahurissante qui part du principe que la charge morale est trop pesante pour la confier à des êtres humains dont la sensibilité est ainsi soumise à rude épreuve. Herzog a l’humilité de rester constamment en retrait. Il a compris que ses images se suffisent à elles-mêmes et qu’il aurait été superfétatoire d’y ajouter quoi que ce soit. Ce film aussi essentiel que troublant est un prodigieux témoignage humain, constamment en équilibre précaire sur le fil qui sépare le vrai du faux, comme le célèbre Vérités et mensonges (1973) d’Orson Welles. Or, c’est précisément cette ambiguïté qui fait tout son charme
Jean-Philippe Guerand




Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Le paradis des rêves brisés

La confession qui suit est bouleversante… © A Medvedkine Elle est le fait d’une jeune fille de 22 ans, Anna Bosc-Molinaro, qui a travaillé pendant cinq années à différents postes d’accueil à la Cinémathèque Française dont elle était par ailleurs une abonnée assidue. Au-delà de ce lieu mythique de la cinéphilie qui confie certaines tâches à une entreprise de sous-traitance aux méthodes pour le moins discutables, CityOne (http://www.cityone.fr/) -dont une responsable non identifiée s’auto-qualifie fièrement de “petit Mussolini”-, sans nécessairement connaître les dessous répugnants de ses “contrats ponctuels”, cette étudiante éprise de cinéma et idéaliste s’est retrouvée au cœur d’un mauvais film des frères Dardenne, victime de l'horreur économique dans toute sa monstruosité : harcèlement, contrats précaires, horaires variables, intimidation, etc. Ce n’est pas un hasard si sa vidéo est signée Medvedkine, clin d’œil pertinent aux fameux groupes qui signèrent dans la mouva

Bud Spencer (1929-2016) : Le colosse à la barbe fleurie

Bud Spencer © DR     De Dieu pardonne… Moi pas ! (1967) à Petit papa baston (1994), Bud Spencer a tenu auprès de Terence Hill le rôle de complice qu’Oliver Hardy jouait aux côtés de Stan Laurel. À 75 ans et après plus de cent films, l’ex-champion de natation Carlo Pedersoli, colosse bedonnant et affable, était la surprenante révélation d’ En chantant derrière les paravents  (2003) d’Ermanno Olmi, Palme d’or à Cannes pour L’arbre aux sabots . Une expérience faste pour un tournant inattendu au sein d’une carrière jusqu’alors tournée massivement vers la comédie et l’action d’où émergent des films comme On l’appelle Trinita (1970), Deux super-flics (1977), Pair et impair (1978), Salut l’ami, adieu le trésor (1981) et les aventures télévisées d’ Extralarge (1991-1993). Entrevue avec un phénomène du box-office.   Rencontre « Ermanno Olmi a insisté pour que je garde mon pseudonyme, car il évoque pour lui la puissance, la lutte et la violence. En outre, c’était

Jean-Christophe Averty (1928-2017) : Un jazzeur sachant jaser…

Jean-Christophe Averty © DR Né en 1928, Jean-Christophe Averty est élève de l'Institut des Hautes Etudes Cinématographiques (Idhec) avant de partir travailler en tant que banc-titreur pour les Studios Disney de Burbank où il reste deux ans en accumulant une expertise précieuse qu'il saura mettre à profit par la suite. De retour en France, il intègre la RTF en 1952 où il réalisera un demi-millier d'émissions de radio et de télévision dont Les raisins verts (1963-1964) qui assoit sa réputation de frondeur à travers l'image récurrente d'une poupée passé à la moulinette d'un hachoir à viande et pas moins de 1 805 numéros des Cinglés du music-hall (1982-2006) où il exprime sa passion pour la musique, sur France Inter, puis France Culture, lui, l'amateur de jazz à la voix inimitable chez qui les mots semblent se bousculer. Fin lettré et passionné par les images, l’iconoclaste Averty compte parmi les pionniers de la vidéo et se caract