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"Benni" de Nora Fingscheidt



Systemsprenger
Film allemand de Nora Fingscheidt (2019), avec Helena Zengel, Albrecht Schuch, Gabriela Maria Schmeide… 1h58. Sortie le 22 juin 2020.




Benni, 9 ans, a été confiée aux services sociaux par sa mère qui s’est révélée impuissante à canaliser son énergie. Révoltée contre cette injustice qui la prive d’une enfance normale, la gamine va d’échec en échec. Au point d’avoir épuisé toutes les solutions qui s’offrent aux enfants dans sa situation. Jusqu’au moment où une assistante sociale compatissante et un éducateur déterminé vont tenter de percer le mystère de sa révolte permanente. Le premier film de la réalisatrice allemande Nora Fingscheidt, couronnée du prestigieux Prix Alfred Bauer à la Berlinale 2019, impressionne par sa radicalité et son refus de séduire. C’est pourtant l’un des plus beaux portraits de l’enfance en danger jamais réalisés depuis Les quatre cents coups de François Truffaut, Kes de Ken Loach ou Pixote d’Hector Babenco. Il montre comment le système en place échoue à s’adapter aux cas les plus extrêmes. Au risque de choisir une protagoniste principale qui est loin d’attirer la sympathie, puis de nous faire entrer peu à peu dans son monde intérieur, aussi déroutant soit-il.




Benni est un film puissant et bouleversant qui ne joue jamais la carte de l’apitoiement. Le mérite en revient évidemment à une direction d’acteurs exceptionnelle et surtout à la personnalité prodigieuse de la petite Helena Zengel, choisie depuis par Tom Hanks en personne pour être sa partenaire dans le nouveau film de Paul Greengrass, News of the World. Elle excelle dans cette composition d’enfant sauvage au regard pénétrant dont les cris et la fureur déroutent les adultes. Entre révolte et désespoir, ce film magistral résonne comme un cri du cœur d’une rare intensité et ne laisse aucune marge de manœuvre à l’optimisme ou à l’angélisme.
Jean-Philippe Guerand



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