Xavier Beauvois ©DR
Né en 1967, Xavier Beauvois est autodidacte. Initié au cinéma par Jean Douchet, il est stagiaire sur Mon cas (1986) de Manoel de Oliveira, puis assistant d'André Téchiné sur Les innocents (1987), et accomplit ses débuts de réalisateur avec un court métrage intitulé Le matou (1986). Parallèlement à une carrière de comédien riche d'une quarantaine de rôles, son premier long, Nord (1991), lui vaut trois prix à Montréal et deux nominations aux César. Il signe par la suite N'oublie pas que tu vas mourir (1995), Prix Jean Vigo et Prix du jury à Cannes, Selon Matthieu (2000), Le petit lieutenant (2005), qui vaut le César de la meilleure actrice à Nathalie Baye. Mais c'est Des hommes
et des dieux (2010), inspiré par l’assassinat des moines de Tibhirine, perpétré en 1996 en Algérie, qui lui vaut la consécration de la critique et la reconnaissance du public, en remportant le Grand Prix du jury à Cannes et trois César dont celui du meilleur film. Il enchaîne avec La rançon de la gloire (2014), puis Les gardiennes (2017) qui marque sa rencontre avec la productrice Sylvie Pialat, ses
retrouvailles avec Nathalie Baye, associée pour la première fois au cinéma avec sa fille, Laura Smet, et la révélation d'Iris Bry. Un film d'époque qui évoque la Grande Guerre de l’arrière,
à travers le rôle capital tenu par les femmes.
Comment avez-vous découvert le roman d’Ernest Pérochon dont s’inspire Les gardiennes ?
Xavier Beauvois Par ma productrice, Sylvie Pialat. Son grand-père possédait très peu
de livres, mais en avait de Pérochon qui a obtenu le prix Goncourt en 1920. Et
quand elle a rencontré Maurice Pialat, qui connaissait aussi cet auteur et
l’aimait beaucoup, il a été très étonné qu’elle en ait également entendu parler
et ça a contribué également à les rapprocher. De mon côté, j’avais croisé
plusieurs fois Sylvie avec qui j’avais un bon feeling et à un moment elle m’a
filé le bouquin que j’ai posé à côté de mon lit sans le lire. Après La rançon de la gloire, j’ai eu une idée
de film, mais Pascal Caucheteux m’a un peu découragé en m’expliquant que
c’était trop compliqué, car il y était question des Noirs américains qui ont
participé au Débarquement en Normandie, ce qui impliquait que le film parle à
la fois français et anglais. Or les Américains ne m’aideraient pas et l’avance
sur recettes serait compliquée à obtenir. Du coup, j’ai ouvert le livre
d’Ernest Pérochon que j’ai trouvé très intéressant.
Qu’est-ce qui vous a tant plu dans ce roman ?
X. B.
J’avais aussi envie de faire un film de femmes, car j’avais déjà beaucoup donné
chez les hommes. Et puis, j’avais remarqué en tournant Des hommes et des dieux que quand on a un lieu à soi, en
l’occurrence un monastère ou une ferme, contrairement à d’autres films où l’on
doit enquiller les décors, on peut se laisser inspirer par le temps, la météo,
renoncer à une séquence ou en ajouter une autre. Du coup, le scénario devient
plus malléable. Sur le tournage des Gardiennes,
je n’ai pas arrêté de changer des séquences. Truffaut disait toujours que le
tournage est la critique du scénario et que le montage est la critique du
tournage. Moi, j’essaie toujours d’écrire le scénario le mieux possible, car
c’est un outil de travail, mais j’ai le cerveau en érection quand je suis en
tournage, car il y a des choses que je ne vois pas six ou deux mois avant, car
ça ne m’intéresse pas et que ce n’est pas le moment. Alors quand je suis sur le
plateau, c’est mon lieu et j’ai une acuité et un instinct phénoménaux. Jean
Douchet dit qu’il y a des cinéastes de l’écriture et des cinéastes du montage.
Moi, je suis un pur du tournage. Au début, quand elle m’a vu arracher des pages
entières de dialogue, Nathalie Baye a eu peur et m’a demandé si je voulais
faire The Artist. Je lui ai répondu
que ces gens-là étaient des taiseux. Sur Des
hommes et des dieux, par exemple, j’avais une scène dans le dispensaire de
frère Luc qu’incarnait Michael Lonsdale et en relisant le dialogue, je l’ai
trouvé nul. Alors, comme il faisait beau, j’ai décidé d’aller dehors et j’ai
dit à Lonsdale qu’il parlait tout le temps d’amour et que ce serait marrant que
la petite lui demande s’il avait déjà été amoureux. Il a dit oui et j’ai
demandé à Caroline Champetier si je pouvais les asseoir sur un banc. La petite
a posé la question à Lonsdale qui lui a répondu par un dialogue époustouflant.
Je n’ai fait qu’une seule prise et c’était magnifique.
Le film est-il fidèle au roman ?
X. B.
C’était la première fois que j’adaptais un livre et j’ai trouvé formidable ce
concept qui consiste à trahir. Je me suis totalement approprié ce roman. J’ai
changé de région, parce qu’à l’origine, l’action se passait dans le marais
poitevin et que j’avais peur que ce soit trop touristique. Comme c’était
impossible en Normandie, où je vis, en raison du démembrement, et dans le Pas-de-Calais,
d’où était originaire ma mère, parce que le front y passait, j’ai envisagé
l’Auvergne, mais les fermes ne me plaisaient pas car elles étaient en pierres
apparentes, ce qui aurait constitué un anachronisme. Du coup, on a opté pour le
Limousin.
Quelle est la principale difficulté que vous ayez rencontrée ?
X. B.
Bizarrement, c’est de trouver des vaches qui aient des cornes. C’est devenu
très rare. Nous avons même rencontré un collectionneur de bétail qui possédait des
spécimens venus du monde entier. Pour les cochons, nous avons dû enlever le
matricule qu’on leur fixe aux oreilles, mais nous nous sommes heurtés à un vide
juridique car personne n’a jamais besoin de les ôter, ce qui nous a contraints
à monter en haut lieu et à prélever l’ADN des animaux pour vérifier que c’était
les mêmes ! Il nous a aussi fallu former les figurants aux travaux des
champs, tels qu’ils se pratiquaient à l’époque, ce qui était tout un art. On
est même allé jusqu’à planter du blé d’époque !
Avez-vous procédé à d’autres changements significatifs ?
X. B.
J’ai aussi éliminé des personnages, notamment des enfants, parce que l’action
se déroulait sur plusieurs années, ce qui impliquait des vieillissements
délicats, et une sœur malade, car ça faisait un peu trop de malheurs. Le
principe du livre m’a plu, parce qu’il m’a fait penser aux Parapluies de Cherbourg. Quand j’en ai parlé à Michel Legrand en
lui disant que c’était un grand film de guerre, il m’a répondu qu’ils n’avaient
pas fait exprès, mais que c’était le moyen qu’ils avaient trouvé pour justifier
l’absence du personnage masculin.
C’est le sixième film que vous tournez avec Caroline Champetier.
Comment fonctionne-votre association ?
X. B.
Je fais le cadre, mais je ne tiens pas la caméra, parce que ça implique aussi
de vérifier s’il n’y a pas un reflet, le regard d’un figurant ou une perche
dans le champ. C’est très technique, donc je ne vois pas comment faire cela et
se concentrer sur l’émotion des acteurs. Avec Caroline Champetier, on
s’engueule toujours un peu, parce que je suis monsieur Front et elle madame
Biais : moi, quand je filme quelqu’un, j’ai tout le temps envie d’être en
face. Elle a aussi tendance à être trop près, alors que j’aime bien prendre un
peu plus de distance. L’avantage de travailler ensemble depuis mon deuxième
film, c’est que je connais sa culture. Je n’ai pas besoin de lui dire qu’un
terroriste allongé doit être éclairé comme le Christ de Mantegna : elle y
pense toute seule. Pour Les gardiennes,
on a parlé un peu peinture avant, parce qu’on s’est dit qu’il ne fallait pas
que ce soit une succession de tableaux. D’autant plus qu’à l’époque, les
peintres rendaient compte de la réalité sociale qui était encore à quatre-vingt
pour cent labourage et pâturage, notamment en raison de la beauté de la lumière
de la campagne. J’ai veillé à ce que ce soit beau, en appliquant la formule de
Serge Daney : « Il faut faire des plans, pas des images. »
Vous êtes-vous inspiré aussi de vos origines rurales ?
X. B.
J’ai bien connu mon grand-père qui était cantonnier et qui possédait une toute
petite ferme. Il n’avait ni salle de bains ni toilettes, mais il élevait des
poulets, des lapins, des cochons, un potager et des fraises, qu’on qualifierait
aujourd’hui de cent pour cent bio, mais c’était normal. Mon père est devenu
quant à lui préparateur en pharmacie, donc il est passé de ce petit village à
la ville de dix mille habitants. Du coup, en raison de cette avancée sociale,
mes parents considéraient mes grands-parents paternels comme des ploucs. Quand
j’ai tourné Nord chez mon grand-père,
Bernard Verley qui tenait le rôle de mon père, m’a dit que mon grand-père était
un prince. Aujourd’hui, c’est moi qui habite dans une ferme, où j’ai des poules
et un potager, et j’avais envie de rendre compte de cette réalité. Par
ailleurs, j’ai remarqué qu’à l’époque, ces gens avaient beaucoup de classe,
parce que le prêt-à-porter n’existait pas et que les femmes fabriquaient
elles-mêmes leurs vêtements sur mesure.
Comment vous êtes-vous documenté ?
X. B.
À chaque film, on a le droit à des profs particuliers sur un sujet qui vous
passionne, que ce soit des flics pour Le
petit lieutenant, un moine sur des Hommes
et des dieux, ou en allant chez Chaplin pour La rançon de la gloire, en s’asseyant à sa table, en allant dans sa
douche ou en voyant l’ascenseur qui servait à monter les bûches. Ce qui est
intéressant, c’est qu’on a l’impression de faire des études en fonction du
sujet, aussi bien avant que pendant le tournage. Pour Les gardiennes, je me suis fait expliquer plein de choses par un
historien qui est venu vérifier les décors. Il m’a notamment fait remarquer à
propos d’un arbre qu’il était anachronique, parce qu’il y avait plein de
petites branches qui partaient du tronc, alors qu’à l’époque les gens avaient
besoin de petit bois et élaguaient systématiquement les branches les plus
basses pour faire des fagots. En règle générale, il faut toujours en savoir
plus que ce dont on a besoin pour être en mesure d’improviser en fonction des
circonstances. La particularité des soldats de la Première Guerre mondiale,
c’est qu’ils ne parlaient pas ou peu des combats quand ils revenaient en
permission dans leur famille. Comme s’ils avaient peur de les effrayer. En
revanche, ils écrivaient beaucoup lorsqu’ils étaient au front. Au point que
l’Etat français a engagé quatre cent mille personnes en plus pour trier et
acheminer le courrier qui était gratuit. Or, certains soldats écrivaient une
lettre par jour à leur fiancée. Je m’en suis d’ailleurs aussi inspiré, y
compris de celles de soldats allemands car c’était les mêmes. Ils étaient
identiques des deux côtés du front.
De quelle façon travaillez-vous avec les comédiens ?
X. B.
J’évite les répétitions. Car quand on travaille avec des enfants, par exemple,
ils sont bons très rapidement Donc je préfère inviter les acteurs chez moi, en
Normandie, et papoter de choses et d’autres, que ce soit du film ou de raconter
des anecdotes sur la guerre, de leur montrer des objets ou des photos. C’est
plus piscine et côte de bœuf, et c’est très agréable. J’ai vraiment trop peur
d’avoir un truc sublime et de ne pas l’avoir filmé. Je n’aime pas non plus les
lectures car on est autour d’une table à Paris et qu’on va tourner dans le
Limousin. Après, ils ont tout à fait le droit de faire des italiennes dans mon
dos.
Dans Les gardiennes, il y a
un décalage a priori très fort entre l’expérience considérable de Nathalie Baye,
avec qui vous avez déjà tourné Le petit
lieutenant, et Iris Bry qui accomplit ses débuts à l’écran. Comment
avez-vous géré cette situation ?
X. B.
J’ai commencé par voir deux ou trois actrices qui ne me plaisaient pas du tout.
J’ai insisté auprès de la directrice de casting pour trouver quelqu’un d’autre
et elle a croisé Iris Bry dans une rue de Montreuil où elle travaillait dans
une librairie. Elle lui a proposé de passer des essais, sans qu’elle sache même
de quoi il s’agissait. Quand elle me les a envoyés en Normandie, j’ai été
bluffé et j’ai appelé Sylvie Pialat pour qu’elle me dise ce qu’elle en pensait.
Je l’ai rencontrée, l’ai fait venir à la maison et lui ai expliqué en quoi
consistait un tournage : la cantine, les micros HF, etc. Elle est revenue,
on s’est apprivoisés et comme elle est très intelligente, je lui ai parlé de La nuit américaine en lui expliquant que
ça ne se passait pas du tout comme ça, mais qu’en même temps… ça se passait
exactement comme ça. Elle a rencontré Nathalie, a appris à manier les bœufs, à
faire fonctionner la charrue, la herse, les chevaux. C’est devenu concret petit
à petit avec l’essayage des costumes et le matin du premier jour de tournage,
elle a pleuré de trac, mais elle est rentrée dedans bille en tête et les
techniciens ne voulaient pas croire qu’elle n’avait jamais mis les pieds sur un
plateau.
A-t-elle gagné de la place dans le film ?
X. B.
Quand je me suis rendu compte qu’elle savait très bien chanter, j’ai décidé de
rajouter une séquence seulement cinq jours avant la fin du tournage. Sylvie a
accepté d’ajouter une journée de tournage, il a fallu trouver un orchestre en
urgence et j’ai réquisitionné comme figurants les gens de l’équipe, mes
assistants et moi. Je dis toujours que le film a une âme, comme un enfant, et
qu’il faut l’écouter car il vous dit des choses. Il y a des gens qui refusent
de changer la moindre ligne à leur scénario. Moi, j’écoute ce qui se passe pour
faire un film plus intelligent que moi, donc la seule solution, c’est de prendre
l’intelligence des autres. Le cinéma est un travail d’équipe, mais les acteurs
ne sont pas des robots. Quand j’ai tourné Des
hommes et des dieux, chacun de mes interprètes a choisi sa façon de se
prépare à son rôle. Certains ont rencontré la famille des moines assassinés,
d’autres ont procédé autrement, mais quand on a autant de personnages, il est
impossible d’être aussi malin que l’acteur qui va fouiner. Du coup, chacun
d’eux vous apporte des choses.
Quel est le budget des Gardiennes ?
X. B.
Huit millions d’euros. On a tourné en deux fois pour une question de saisons.
D’abord en été, puis on a arrêté pendant deux mois et on a repris pour
l’automne et l’hiver. Entre-temps, il a fallu tout garder en l’état, les fermes
comme les animaux.
Les gardiennes a-t-il été un film compliqué à monter ?
X. B.
Pas particulièrement. En fait, l’ensemble du processus m’a semblé plus rapide
que d’habitude. Du moment où j’ai décidé de faire le film avec Sylvie Pialat à
aujourd’hui, ça a été un pur délice. Comme elle a débuté à la régie et a vécu
avec un grand metteur en scène, elle sait ce que c’est qu’un tournage, que des
repérages, que de vivre à l’hôtel. Par exemple, à un moment, le personnage
interprété par Laura Smet avait un bébé et dès le premier jour ça a été un
enfer. C’est la fameuse règle des trois B : les bêtes, les bateaux et les
bébés. Tout devient imprévisible et le plan de travail s’avère immaîtrisable.
Pour les bébés, tout va bien si l’on a cinq ou dix car dès que l’un d’eux est
fatigué, on peut le remplacer par un autre. C’est Sylvie qui m’a suggéré de
supprimer ce rôle, qui était prévu sur vingt-et-un jours, et je l’ai écoutée.
Du coup, j’ai rajouté une belle scène où Laura dit qu’elle ne peut pas avoir
d’enfant. Sylvie est bienveillante, avec de l’humour, et elle aime les bons
restos. En plus, elle m’appelle « mon poussin » ou « mon poussin
bleu », donc c’est vraiment une belle rencontre.
Est-ce que c’est susceptible d’accélérer votre rythme de tournage ?
X. B.
C’est peut-être un hasard, mais j’ai déjà une idée pour mon prochain film… Un
scénario original que je vais me mettre à écrire dès que j’en aurai terminé
avec Les gardiennes, mais il est trop
tôt pour en parler.
Pourquoi tournez-vous à une cadence aussi lente ?
X. B.
J’essaie de bâtir une œuvre avec des films dont je sois fier. Et je compense
l’absence des plateaux par le fait d’être acteur. Par exemple, je viens
d’interpréter un réalisateur de films porno des années 80 dans le nouveau film
de Cédric Anger et nous nous sommes bien marrés. Chabrol me disait :
« Moi, je fais un mur dont chaque film est une brique. Il y aura des chefs
d’œuvre, des très bons films, des moyens et des navets. » Le tournage est
comme une drogue dure, donc il faut accepter de faire des films moins bons si
on veut tourner tout le temps. Quelqu’un comme Ozon qui n’arrête pas de
tourner, par quel miracle trouve-t-il toujours le bon bouquin ?
Comment faites-vous pour résister à la tentation de vous mêler de la
mise en scène, lorsque vous tournez comme acteur ?
X. B.
Ça dépend des metteurs en scène. Récemment, par exemple, j’ai tourné sous la
direction de Valeria Bruni Tedeschi et je lui ai fait des réflexions. À un
moment, il y avait un sanglier qui creusait un trou de trois mètres de
profondeur, or, j’en vois passer régulièrement dans mon jardin pour chercher
des vers. Ils détruisent tout sur leur passage, mais ils ne creusent jamais un
trou aussi profond. Ensuite, le type qui tuait le sanglier le caressait, or il
était musulman, donc je lui ai dit que là aussi c’était impossible et elle m’a
écouté. En contrepartie, en étant acteur, j’apprends moi aussi toujours quelque
chose… y compris ce qu’il ne faut pas faire, ce qui est toujours intéressant.
Comment avez-vous convaincu Michel Legrand de composer la musique de La rançon de la gloire ?
X. B.
Je me suis dit que faire un film sur Chaplin était très musical et j’ai décidé
de m’adresser à quelqu’un que j’admirais particulièrement. Au pire, il aurait
refusé. Je lui ai donc envoyé une copie du film terminé et il m’a rappelé en me
disant : « C’est formidable ! On va beaucoup
s’amuser ! » Il voulait aller enregistrer à Los Angeles, mais je
n’avais pas particulièrement envie d’aller habiter là-bas où je ne suis jamais
allé. C’est sa femme, Macha Méril, qui lui a suggéré de travailler à la maison.
C’est comme ça que je me suis retrouvé chez lui où il n’avait jamais travaillé
avec aucun metteur en scène. D’habitude, il va en studio. Comme mon épouse est
aussi ma monteuse, on a calé les images en face de son piano de quatre cent
mille euros et il a composé en les regardant. Cela impliquait aussi de prendre
le petit déjeuner ensemble, d’aller faire les courses, mais à l’époque où il
travaillait avec Jacques Demy, je sais qu’ils se détendaient en jouant avec des
trains électriques et des petites voitures entre deux prises. Moi, je lui ai
apporté un petit hélico avec lequel on s’amusait dans le salon, et quand il est
venu chez moi à la campagne, on a aussi fait des parties de pêche et on a tiré
à la carabine. À chaque repas, il nous régalait d’anecdotes incroyables et on
sortait de table, un peu plus intelligents. Le plus fou, c’est quand on est
allés présenter le film à Venise. Michel Legrand qui avait voyagé partout dans
le monde n’y était jamais allé. Il s’est loué une suite et a été ébloui par
tant de beauté. Il répétait qu’un tel lieu ne pouvait pas exister !
Avez-vous procédé de la même façon sur Les gardiennes ?
X. B.
Cette fois, je savais que la musique allait entraîner des changements, mais
Michel Legrand n’a vu aucune image avant la fin du tournage.
Propos recueillis par
Jean-Philippe Guerand
en novembre 2017
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