Murali Nair © DR
Murali Nair est né en 1966 dans l’état indien du Kerala. Après le court métrage Tragedy of an Indian Farmer (1993), il en signe un autre, Un long voyage (1996), qui est présenté en compétition à Cannes, puis se fait connaître sur le plan international avec son premier long, Le trône de la mort (1999), qui obtient plusieurs récompenses dont la prestigieuse Caméra d'or. Attiré par un fantastique nourri de traditions séculaires parfois métaphysiques, il réalise par la suite Le chien du rajah (2000), Arimpara (2003), Unni (2007), le sketch The Crossing dans le cadre du film collectif Histoires de droits de l’homme (2008) et La chèvre stérile (2009).
Dans quelles conditions avez-vous tourné Arimpara ?
Il
y avait longtemps que je pensais à ce film. J’ai été enthousiasmé par cette
histoire depuis le jour où je l’ai lue pour la première fois. Elle a été imaginée
en 1977 par le grand écrivain de la littérature malayalam O.V.Vijayan. L’époque
de sa publication correspond aussi au bref laps de temps au cours duquel le
fantasme de liberté lié à la démocratie a été incarné par le Premier ministre
de l’époque, Rajiv Gandhi. Chaque fois que les gens au pouvoir commettaient des
actes malveillants ou nuisibles pour le reste de la société, je me remettais à
penser à cette histoire. Lorsque j’ai commencé à travailler sur ce film, cette
nouvelle m’attirait vraiment. Les versions du script se sont succédées et ce
n’est que récemment que j’ai décidé de m’en inspirer pour en tirer un film.
C’est la première fois que je fais appel à des interprètes professionnels pour
jouer dans un de mes films. Arimpara
a été coproduit par la National Film Development. Corporation d’Inde et la
télévision japonaise. Dès lors, tout s’est déroulé de la façon la plus
harmonieuse qui soit !
À quelle difficulté avez-vous dû faire
face pour mener à bien votre film ?
Le
problème principal résidait dans le maquillage. Il nous fallait en effet
décider à quel point on devait montrer la maladie se propager et ronger le visage de cet homme. Je suis finalement assez satisfait du résultat !
Comment arrivez-vous à mener de front vos
activités de producteur et de réalisateur ?
C’est
assez difficile. L’hémisphère de mon cerveau qui commande la mise en scène
n’est jamais en repos, alors que celui qui gère la production ne se réveille
que de façon occasionnelle, uniquement lorsqu’il s’agit de statuer sur des décisions
capitales. Je choisis mon équipe avec un grand soin, de façon à ce que la moitié de
mon cerveau concernée par la production n’ait besoin d’intervenir que lorsque c’est vraiment nécessaire. Mais une fois que la copie finale est prête, je
laisse la partie de mon cerveau chargée de la production devenir plus active, car
c’est le moment où celle qui gérait la réalisation a vraiment besoin de goûter un repos
bien mérité !
Quelle importance accordez-vous aux
contingences techniques et financières lorsque vous réalisez un film ?
Je
suis incapable de m’angoisser à ce sujet, ce qui me paraît fondamental. Mais,
dans le même temps, je pense qu’il s’agit là de paramètres nécessaires et indissociables du processus créatif lié au film. En tout cas, je considère qu’il devrait en être ainsi.
Quel est le moment que vous préférez quand vous réalisez un film ?
J’en aime
toutes les étapes… Elles sont toutes aussi importante à mes yeux, de l’écriture
du scénario à l’étalonnage de la copie de travail et même à la conception de
l’affiche.
Que représente le Festival de Cannes pour
vous en tant qu’auteur ?
Je
viens toujours à Cannes dans le même état d’esprit, comme c’était déjà le cas
il y a longtemps, quand j’étais enfant, et que je me rendais au temple de mon
village au moment du festival qui y était organisé tous les ans. Cet événement
durait une dizaine de jours et nous, les enfants, nous attendions cet événement
pendant tout le reste de l’année. Dans ma famille, nous avions coutume d’apporter
des offrandes à Dieu à cette occasion. Mon film est en quelque sorte mon
offrande à moi. Présenter le film au meilleur public qui soit constitue pour
moi un véritable aboutissement. Par ailleurs, je profite de Cannes pour y
retrouver tous mes amis, une fois par an. C’est exactement comme au festival de
mon enfance, mais je suis incapable d’exprimer ce que je ressens. Il faudrait
que vous puissiez assister à cet événement qui se déroule dans mon village pour
comprendre vraiment de quoi je parle !
Quels sont vos projets ?
Je
travaille actuellement sur le scénario d’un film au budget légèrement plus
important qui se déroule en Inde et, en même temps, sur un autre projet qui se
déroule quant à lui en Angleterre !
Propos recueillis par
Jean-Philippe Guerand
en mai 2003
The Crossing, sketch d’Histoires de droits de l’homme (2008)
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