Flora Lau © DR
Membre du mouvement dit de la “Fresh Wave” et passée par l’apprentissage du documentaire, la réalisatrice hong-kongaise Flora Lau a réalisé deux courts métrages, 12 : 30 (2008) et Dry Rain (2009), avant de passer au long avec Bends (2013), pour lequel elle a réussi à rallier à sa cause le chef opérateur de Wong Kar-wai, Christopher Doyle, et la star Carina Lau.
Dans quelles conditions techniques et économiques Bends a-t-il été tourné ?
J’ai toujours été intéressée par des aspects de la
société qui sont souvent mal représentés ou incompris, tout particulièrement à
Hong Kong où j’ai grandi et où bon nombre de couches de la société sont
rarement explorées, notamment au cinéma. En gardant à l’esprit mes deux
personnages principaux, j’ai tiré de ce point de départ un scénario à
l’occasion de ma participation au laboratoire cinématographique Binger
d’Amsterdam, en 2010. À la suite de ce séjour en Europe, je suis rentrée à Hong
Kong où j’ai poursuivi mes recherches, notamment en développant le personnage
principal et en commençant à repérer des décors. Au cours de cette période,
j’ai également entrepris d’aller pitcher l’idée du scénario à diverses sociétés
de production, tout en prenant mon mal en patience. J’ai eu la chance que les
producteurs Nansun Shi et Yu Tsang s’intéressent au projet et grâce à leur
soutien, nous avons réuni rapidement autour de Bends une brillante équipe technique et artistique. La pré-production a duré deux mois et
le tournage proprement dit un mois, en octobre 2012.
Quelle est la principale difficulté que vous ayez
rencontrée au cours de cette aventure et quel enseignement éventuel en
avez-vous tiré pour la suite ?
Dans la mesure où il
s’agissait de mon premier long métrage, l’ensemble du processus de la
fabrication du film a constitué pour mois une intense période d’apprentissage
et je me suis sentie extrêmement privilégiée d’avoir l’occasion de collaborer
avec des gens aussi talentueux. Au cours de la période d’écriture, j’ai
découvert combien il est important de rester fidèle vis-à-vis des personnages,
de façon à raconter une histoire qui soit convaincante et qu’un contexte social
crédible se détache naturellement à travers de menus détails. Pendant le
tournage proprement dit, j’ai aussi appris à me fier à mon instinct, tout en
conservant une certaine flexibilité qui permette de s’adapter aux nouvelles
idées, ce qui est crucial.
Quelle conception vous faites vous de votre métier de
réalisatrice ?
Je m’intéresse depuis
longtemps à la photo qui a toujours été l’un de mes passe-temps préférés. Je me
suis décidée à quitter mon emploi de bureau en 2005 pour prendre une caméra et
réaliser un documentaire sur la vie quotidienne des employés d’entretien
étrangers à Hong Kong. J’étais intriguée par leur situation qui les conduit à
laisser leur famille dans d’autres parties de l’Asie afin de tenir des emplois
de domestiques à Hong Kong pour l’entretenir. Comme la plupart des habitants de
Hong Kong, j’ignorais tout de leur mode de vie en dehors du cadre professionnel
et je voulais en savoir plus. Cette expérience de tournage impromptu s’est
révélée être le tournant de ma vie et le début de mon itinéraire en tant que
cinéaste. J’ai ressenti comme un véritable honneur et un précieux enseignement
le fait de réaliser mon premier long métrage de fiction en ayant l’opportunité
de travailler avec une équipe aussi formidable. Je pense que mon rôle de
réalisatrice consiste à trouver diverses façons de communiquer ma vision à tous
les membres de mon équipe, à collaborer avec chacun d’eux, à leur donner de
l’inspiration et à leur permettre de donner le meilleur d’eux-mêmes.
Propos recueillis par
Jean-Philippe Guerand
en mai 2013
Bande annonce de Bends (2013)
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