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Ana Katz : Tempête sous un crâne

Ana Katz © DR

Née en 1975, la réalisatrice argentine Ana Katz a signé cinq courts métrages et quatre longs : El juego de la silla (2002), distingué par la critique française au festival de Toulouse et Prix de la mise en scène à Trieste, La fiancée errante (2007), présenté en sélection officielle au Festival de Cannes dans la section Un Certain Regard, Los Marziano (2011) et Mi Amiga del Parque (2015). Par ailleurs interprète de plusieurs de ses films, elle a également joué dans Whisky (2004) de Juan Pablo Rebella et Pablo Stoll, Lengua materna (2010) de Liliana Paolinelli, El critico d’Hernan Gerschuny et Por un tiempo (2013) de Gustavo Garzon. Elle est mariée au comédien Daniel Hendler.


Dans quelles conditions s’est monté La fiancée errante ?
Ana Katz. J’ai co-écrit le scénario de La fiancée errante avec Ines Bortagaray. Pendant un an, nous nous sommes rendues régulièrement ensemble à Mar de la Pampas, le petit village dans lequel je souhaitais absolument tourner le film. Son idée originelle est née à un moment où j’attendais des réponses concernant le financement d’un autre projet, Bienestar, dont j’ai écrit le scénario en 2004, mais que je ne réaliserai finalement pas avant 2008. Le film s’est monté de manière quasi-impulsive, tout en respectant le processus de développement créatif du scénario. D’une certaine manière, je ne souhaitais pas que les décisions liées à la production viennent altérer le développement de ce film en particulier. La fiancée errante est un film très intimiste, qui suit les différents états d’âme et d’esprit d’Inès, une femme perturbée, aveuglément prisonnière d’un amour déchu. Je souhaitais tourner le film en peu de temps -quatre semaines-, avec une caméra qui épouse systématiquement le regard du personnage principal, mais en utilisant un équipement très présent et parfois encombrant. Le casting a été établi très rapidement -je pense au choix des comédiens dès l’écriture- et la décision de me choisir comme personnage principal du film a été difficile à prendre mais je me suis finalement rendue compte que le propos du projet reposait sur cette faculté.

Quelle difficulté avez-vous rencontrée au cours de cette aventure ?
Une peur indéniable accompagne le courage qu’il faut pour se lancer dans ce genre d’entreprise. Si je devais me relancer dans le projet, j’essaierai sans doute de souffrir un peu moins et de me poser moins de questions. Pour le reste le processus de production a été très agréable et s’est fait par étapes. Je n’ai pas eu l’impression d’avoir rencontré autant de difficultés que pour mon premier film, El juego de la silla.

Bande annonce d’El juego de la silla (2002)

Quelle conception vous faites-vous du métier de réalisatrice ?
Mon objectif principal en tant que réalisatrice est sans aucun doute de me sentir proche de la réalité. Je recherche plus la liberté que le respect des autres; essayer de trouver la forme qui permettra de garder l’identité du film, savoir écouter, ne pas me prendre au sérieux, me rapprocher des acteurs et prendre en considération leurs observations le plus possible. Voici ce qui m’intéresse en tant que réalisatrice.

Quel est le stade de la production qui vous tient le plus à cœur ?
L’étape de l’écriture me passionne. Dans celle-ci, je me crée un monde autonome, avec mes propres lois que je découvre moi-même au fur et à mesure. Les personnages, les différentes trames sont des voyages qui me font réellement vibrer pendant tout ce processus d’écriture. J’essaye de m’éloigner de mon quotidien qui me paraît dans ces moments là ridicule et risible.

Quelle importance accordez-vous aux bonus DVD ?
En effet, les bonus permettent de rendre compte des différents processus de développement du film. Ceux du DVD de La fiancée errante devraient inclure un making-of, des entretiens avec les comédiens, des extraits de la BO et certainement d’autres petites secrets autour du film.

Bande annonce de La fiancée errante (2007)

Qu’incarne à vos yeux le Festival de Cannes ?
Il y a deux ans, un film que j’adore, Whisky de Juan Pablo Rebella et Pablo Stol, a été présenté à Cannes dans la sélection Un Certain Regard. J’y jouais un petit rôle aux côtés de Daniel Hendler. J’ai été très émue lorsque j’ai appris que La fiancée errante film était sélectionné : c’est pour moi un réel honneur et une vraie chance pour le film.

Quel autre métier auriez-vous pu pratiquer si vous n’aviez pas travaillé dans le cinéma?
Je travaille dans le cinéma en tant que scénariste, actrice et réalisatrice. Je suis également active dans le théâtre qui est mon autre passion. Lorsque j’étais enfant j’étais passionnée par l’archéologie, mais peut-être est-il déjà trop tard pour  tout recommencer…
Propos recueillis par
Jean-Philippe Guerand

en mai 2007


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