Pawel Pawlikowski © DR
Roman
« Bien que My Summer of Love soit tiré d’un roman d’Helen Cross, j’ai beaucoup remanié son intrigue et n’en
ai conservé que certains éléments. J’étais surtout intéressé par les deux
personnages principaux, des jeunes filles de conditions sociales très différentes
qui se rapprochent le temps d’un été. J’ai rencontré naguère une fille
mythomane et manipulatrice et j’arrivais assez bien à m’identifier à l’autre,
dans la mesure où j’ai moi aussi été victime de mon innocence quand j’étais
jeune. En revanche, j’ai gommé tout le contexte historique du livre car il se déroulait
pendant la longue grève des mineurs des années quatre-vingt et que celle-ci
avait notamment servi de cadre à Billy Elliot. »
Religion
« En tant que Polonais, j’ai grandi
dans un milieu de catholiques pratiquants. C’est sans doute ce qui m’a incité à consacrer un
documentaire à un prêtre évangéliste du Yorkshire à la fin des années
quatre-vingt. À cette occasion, j’ai eu l’occasion de rencontrer des adeptes
des Chrétiens Ressuscités comparables à ceux que je montre dans le film et dont
fait partie le frère de Mona incarné par Paddy Considine pour lequel j’ai écrit
ce rôle. Lorsque le tissu social commence à s’effilocher, les sectes ont toute
liberté pour se développer, quitte à se substituer aux religions
traditionnelles. Les gens ont besoin de quelque chose à quoi s’accrocher. D’ailleurs,
on dit qu’il n’y a que la foi qui sauve… [rires] »
Racines
« Même si je suis né en Pologne, j’habite
en Grande-Bretagne depuis 1977. Pourtant je me sens perpétuellement en
situation d’étranger, ce qui modifie ma façon de regarder les choses. Quand je
suis arrivé en Angleterre, l’obstacle de la langue modifiait mon regard car je
devais interpréter ce que je ne comprenais pas. En revanche, sur le plan cinématographique,
j’ai été nourri de films anglais. Quand j’étais enfant, en Pologne, ma mère
travaillait comme lectrice d’anglais à l’université de Varsovie et disposait d’un
laissez-passer permanent pour le British Council. Cela m’a permis de voir
beaucoup de films du Free Cinema et comme je ne comprenais pas la langue, j’essayais
de comprendre en me concentrant sur les images. J’en ai sûrement gardé une
vision particulière de l’Angleterre.
Aujourd’hui, je collabore avec un chef opérateur polonais, Ryszard Lenczewski,
qui a aussi éclairé Transit palace [et par la suite “Ida”]. »
Interprètes
« Au départ, j’ai envisagé de
confier les deux rôles principaux à des non-professionnels. J’ai même procédé à
un casting à Leeds et à Manchester, mais en voyant le résultat de ces auditions,
j’y ai renoncé. Quand j’ai rencontré Natalie Press, je lui ai fait répéter le rôle
de Tamsin, la fille libérée, mais comme elle se sentait mal à l’aise dans ce
personnage qui marquait ses débuts au cinéma, j’ai préféré lui confier celui de Mona. Quant à
sa partenaire, Emily Blunt, c’est son regard qui m’a attiré. Au contact l’une
de l’autre, elles ont fait évoluer leurs personnages et j’en ai tenu compte en
adaptant le scénario à leurs personnalités. C’est aussi ça, la direction d’acteurs. »
Propos
recueillis
par
Jean-Philippe Guerand
en
octobre 2004
Bande annonce d’Ida (2013)
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